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Dividendes des indépendants : pas d’abattement en matière de CSG

Cass. civ. 2e, 21 mars 2024, n° 22-11.687 : la Cour de cassation juge que l'abattement de 40 % sur les dividendes pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu n'est pas applicable pour déterminer l'assiette de la CSG des indépendants.

On sait que la CSG sur les revenus d’activité des indépendants, de même que leurs cotisations sociales, est susceptible de frapper des dividendes versés au contribuable par sa société. En particulier, en application d’une mesure anti-abus applicable depuis 2009, dans le but d’éviter le contournement des cotisations et contributions sociales via une rémunération par distributions plutôt que par le versement d’un salaire, la loi intègre dans l’assiette imposable au nom des associés, dans certains cas, les distributions qui excèdent 10 % du capital social (cf. art. L. 131-6 et L. 136-3 du code de la sécurité sociale).

Dans le litige tranché par la Cour de cassation le 21 mars 2024, le gérant majoritaire d’une société avait demandé à l’URSSAF le remboursement d’une partie des contributions et cotisations sociales qu’il avait acquittées au titre de l’année 2017 au motif qu’il n’avait pas bénéficié, pour leur calcul, de l’abattement de 40 % sur les dividendes applicable en matière d’impôt sur le revenu.

Il faisait valoir que la loi renvoyait aux règles applicables à l’impôt sur le revenu pour l’assiette des contributions et cotisations. A l’époque des faits en effet, l’art. L. 136-3 du CSS relatif à la CSG renvoyait à l’art. L. 131-6 du même code relatif aux cotisations sociales des indépendants, lequel renvoyait à l’impôt sur le revenu. A noter que, depuis la LFSS pour 2024, les textes ont évolué : l’article L. 131-6 du CSS renvoie à l’article L. 136-3, lequel renvoie, en des termes différents, aux articles du CGI applicables à la soumission des distributions à l’impôt sur le revenu.

Le contribuable avait obtenu satisfaction en première instance : le tribunal judiciaire de Tours a condamné l’URSSAF à accorder l’abattement de 40 % et à rembourser le trop-perçu de contributions et cotisations sociales qui en résulte.

La Cour de cassation invalide ce jugement : elle relève que l’article L. 131-6 du CSS, dans sa rédaction applicable en 2017, prévoit que le revenu professionnel des travailleurs indépendants non agricoles est celui retenu pour le calcul de l’impôt sur le revenu « avant application des déductions, abattements et exonérations mentionnés aux dispositions du code général des impôts qu’il énumère », et en déduit qu’ « il en résulte que l’abattement de 40 % du montant brut perçu sur les dividendes pris en compte pour le calcul de l’impôt sur le revenu n’est pas applicable pour déterminer l’assiette des cotisations sociales des travailleurs indépendants non agricoles ». Il en résulte que cet abattement n’est pas non plus applicable en matière de CSG, dès lors que les dispositions relatives à la CSG des indépendants (art. L. 136-3 du CSS) renvoyaient, jusque 2023, à cet article L. 131-6.

L’arrêt ne prend pas position sur l’interprétation à retenir des dispositions actuelles, modifiées par la LFSS pour 2024.

Nota : La rubrique “En pratique” est conçue pour permettre aux professionnels de la fiscalité d’appréhender rapidement les conséquences pratiques d’un texte afin d’en faciliter la lecture et la mémorisation. De par sa nature, le contenu de cette rubrique peut être réducteur. De plus, elle est rédigée en simultané avec le texte principal et n’est pas mise à jour en fonction de l’évolution des textes, ni de leur interprétation par la jurisprudence ou la doctrine.

Compte tenu de la sensibilité, de la variété des situations, des enjeux et de l’évolution constante de la matière fiscale, il est recommandé aux non-spécialistes de consulter un professionnel, le plus souvent un avocat fiscaliste, pour assurer la sécurité juridique de leurs opérations. La rédaction décline toute responsabilité quant à l’application des mesures présentées dans la rubrique “En pratique”.

(…)

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Tours, 6 décembre 2021), rendu en dernier ressort, M. [F] (le cotisant), exerçant son activité professionnelle au sein d’une société dont il est gérant majoritaire, a demandé à l’URSSAF du Centre-Val de Loire (l’URSSAF) le remboursement d’une partie des cotisations et contributions sociales qu’il avait réglées au titre de l’année 2017, au motif qu’il n’avait pas été tenu compte, pour la détermination de l’assiette des cotisations, de l’abattement de 40 % du montant brut perçu sur les dividendes, applicable pour le calcul de l’impôt sur le revenu.

2. Sa demande ayant été rejetée, le cotisant a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Moyens

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L’URSSAF fait grief au jugement de la condamner à rembourser au cotisant une certaine somme au titre des cotisations sociales trop-perçues, alors « que l’assiette des cotisations sociales des travailleurs non-salariés est constituée du revenu retenu pour le calcul de l’impôt sur le revenu, sans qu’il soit tenu compte des exonérations, en ce compris les abattements d’assiette ; que l’abattement de 40 % du montant brut perçu sur les dividendes applicable pour le calcul de l’impôt sur le revenu n’est pas donc
pas applicable pour déterminer l’assiette des cotisations sociales des travailleurs non-salariés, de sorte qu’en jugeant le contraire, le tribunal a violé l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 applicable au litige. »

Motivation

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016, applicable au litige :

4. Selon ce texte, le revenu professionnel pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations d’assurance maladie et maternité, d’allocations familiales et d’assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles est celui retenu pour le calcul de l’impôt sur le revenu avant application des déductions, abattements et exonérations mentionnés aux dispositions du code général des impôts qu’il énumère.

5. Il en résulte que l’abattement de 40 % du montant brut perçu sur les dividendes pris en compte pour le calcul de l’impôt sur le revenu n’est pas applicable pour déterminer l’assiette des cotisations sociales des travailleurs indépendants non agricoles.

6. Pour condamner l’URSSAF à rembourser des cotisations trop-perçues, le jugement retient que dès lors que l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale fait expressément référence au revenu retenu pour le calcul de l’impôt sur le revenu, il convient d’appliquer l’abattement de 40 % prévu pour le calcul de cet impôt, celui-ci n’ayant pas été exclu de l’assiette sociale par l’article L. 131-6 précité.

7. En statuant ainsi, le jugement a violé le texte susvisé.


 

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